Les plumes chez Asphodèle – Il y a bien longtemps


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Illustration

Sur le thème de : Manque, les mots suivants sont à mettre :
frissonner – vide – humeur – plume – embellir – enfin – sommeil – drogué – impasse – poésie – torturer –   trop-plein   – youpi – énergie – absence – temps – dénuement –
bol – idée – déchirement – bus – besoin – abandonné

Il y a bien longtemps.

Il avait besoin de sortir, youpi vive une autre liberté.
Le temps était enfin venu, d’aborder ce déchirement.
C’est dans un total dénuement, des besoins à assouvir tel que se protéger du froid, de la faim, de récupérer dans le sommeil cette nouvelle vie, qu’il eut lhumeur de donner de la voix.

Il subissait une véritable torture de ressentir ce vide qui s’insinuait en lui insidieusement.
Il fut rapidement happé par deux bras rempli d’énergie. Il fallait faire vite, les minutes comptaient.
Le bol d’air qui remplissait ses poumons l’avait fait frissonner.

Une boîte à chaussure, de l’ouate, le poids plume fut déposé rapidement dans ce cocon de douceur où il pu retrouver comme un drogué un succédané de l’espace cossu qu’il avait quitté.
Au bout du jardin en forme d’impasse se trouvait le bâtiment où il allait retrouver la chaleur. Il ne se souvient plus comment étaient les murs. Il percevait juste la lumière diaphane qui passait au-travers des vitrages. Il ressentait la chaleur des rayons. Ceux-ci venaient lécher les meubles, les visages et les embellissaient.
Il n’avait aucune idée qui était cette femme et cet homme qui venaient lui rendre visite, une inspiration de poésie le rempli et goulument il but la part qu’il lui était réservée. Il avait une semaine pour survivre.

Après cette visite, les larmes aux yeux, emplie de ce trop-plein d’amour qu’elle ressentait, elle prit le bus pour rentrer là où ils habitaient temporairement. Une semaine déjà. Comme le temps passait et elle vivait dans l’espérance. L’absence au début fut pénible à supporter. Ensuite c’est l’homme qui alla apporter ce dont le bébé avait besoin. Le lait maternel, l’essence de la vie qui le faisait bondir de jour en jour vers l’ultime date deux mois plus tard, pour sortir à terme de cet endroit où il occupait ce petit lit pour les prématurés.

Quarante ans plus tard, Marianne comprit ainsi que sa fille, suite à une émission entendue à la radio, que les enfants nés trop tôt pouvaient subir un traumatisme d’abandon et où aucun lien affectif n’avait pu être maintenu de par la façon dont ces enfants à cette époque étaient pris en charge.

Aucune responsabilité. Ils subsistent dans le coeur de Maddy les mots : « abandonné » et « rejet » qui mirent bien du temps à trouver leur signification. De ce vide qu’elle ressentait et ne pouvait pas remplir, un jour tout disparu. Il subsiste encore des traces de grains de sable dans le fin-fonds de son inconscience.

© G. Ecrits – 24-10-2015

Cette entrée a été publiée dans Photo. Bookmarquez ce permalien.

22 réactions sur “Les plumes chez Asphodèle – Il y a bien longtemps

  1. J’ai lu deux fois le texte, je n’avais pas compris au début, c’était bien mystérieux mais ensuite…ça coulait de source, c’était beau et émouvant. Un de mes petits-neveux est né avec un mois d’avance, avec une malformation cardiaque, ce bout de chou était en souffrance et il a fallu une semaine entière pour que les médecins s’en rendent compte ! Affolant. J’adore les dernière photos que son grand-père (mon petit frère) nous a envoyées. Mayence rit et gigote joyeusement comme s’il n’avait pas subi de traumatismes. YOUPI ! Le mot trouvé par Adrienne prend tout son sens ! 😀 Bisous Geneviève.

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    • Bonsoir MarieJo,
      Le début du récit réel a été volontairement construit par moi-même pour rester dans le flou et ne pas dévoiler de suite, ce dont il s’agissait. 🙂
      Le mystère, je l’ai voulu et écrit sciemment. Une naissance pas ordinaire que celle que j’ai vécue. A l’époque en 1950, pas d’appareils, rien pour rester en vie. Juste une pièce surchauffée pour subsister et de quoi être nourrie. Actuellement beaucoup d’efforts ont été faits pour la survie des grands-prématurés. Déjà du temps de la naissance de ma petite-fille née le 27 octobre 1992, oui oui, c’est bientôt son anniversaire. La petite fille qui était à côté était née à six mois et demie. Il en fallu beaucoup à faire au niveau de la chirurgie pour arriver à ce qu’elle devienne une petite fille comme les autres. Quant aux malformations cardiaques comme tu l’écris et la souffrance qui s’en est suivie, pauvre petit bout. Il a dû bien pleurer. S’il rit comme si de rien n’était, c’est chouette et YOUP, en effet. La médecine aujourd’hui fait des miracles pour ces touts-petits et c’est tant mieux. Sans oublier l’aide des parents très précieuse et nécessaire pour ne pas briser ce lien dont l’enfant a tellement besoin pour survivre et lutter. Il y a la médecine, mais il y a aussi l’amour. Merci pour ton partage Marie-Jo.
      Bisous et bonne semaine.

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      • j’avais compris et aimé la façon dont tu as débuté ton récit, mais je dois l’avouer, j’en étais à je ne sais combien de textes différents, j’avais perdu de mon attention…il suffit de recommencer et hop, le tour est joué ! 😀 Bonne semaine à toi aussi, je vais aller de ce pas au dodo, je dois me lever de bonne heure, tennis à 9h demain matin et ce n’est pas la porte d’à côté

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    • Pour le côté absence des parents à l’époque et cette cassure qui a brisé le lien entre ma mère et moi oui.
      Sinon, je suis bien vivante et je m’en suis sortie. Nous ne comprenions pas maman et moi, pourquoi nous ne ressentions rien elle et moi au niveau filial. Et un jour au bureau elle me téléphone suite à une émission entendue à la radio sur Europe1. Maman d’origine Française écoutait la radio Française et toutes les émissions intéressantes du matin et puis elle me téléphonait au bureau pour me les
      raconter 😀
      Malgré cela, maman et moi avons été proches dans bien d’autres domaines et elle m’a beaucoup apporté. Toute mon éducation, ce n’est pas rien.
      Bisous Adrienne.

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  2. Je me demandais aussi où tu voulais en venir au début…. Ton texte est surprenant et tout à fait réussi… Ce manque si sournois qui s’immisce si tôt dans la vie…

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    • En effet Marlaguette,
      Un manque qui a existé bien longtemps dans l’existence. Personne n’est responsable. Maman me l’a tant de fois raconté que je ne puis que répéter ses paroles.
      Elle me racontait : « Lorsque je t’ai vue, je n’ai rien ressenti, tu étais comme une étrangère ».
      Après avoir entendu bien d’émissions, lu aussi, comme je puis comprendre. Ce qu’elle et moi nous avons essayé tout au long des années qui se sont écoulées et ceci pendant si longtemps.

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  3. Pingback: 538 mots de plumes légères | Chez Mahie

    • Et oui, j’avais envie de créer du mystère en utilisant volontairement le « il » pour le bébé. 🙂
      En 1950, c’est ainsi que je suis née avec les moyens du bord dont disposait la clinique. Tout est exact, sauf les ressentis du bébé que j’ai bien entendu imaginés 🙂
      La boîte à chaussure et l’ouate c’est tout à fait exact, le jardin aussi qu’il fallait traverser avec les prématurés pour se rendre dans un autre bâtiment. Ma mère et son frère sont nés à cet endroit. Mon frère et moi aussi. Et mes enfants aussi. Sauf qu’à la naissance de mon mari, mon médecin accoucheur m’a annoncé que c’était la dernière fois qu’il restait dans cet clinique, car plus du tout à la hauteur. Mon fils à la naissance en a fait les frais, heureusement sans gravité.

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    • J’ai déjà un peu raconté ce qui c’est passé dans les autres réponses. Maman et moi nous ressentions quelque chose de bizarre et d’étrange. C’était comme cela, sans ressentir aucune culpabilité. En ce qui me concerne un manque, dont je n’ai jamais pu parler avec elle. C’était impossible. Et puis on se fait à des situations de ce type, on s’habitue. Et puis pour moi il y avait les études qui étaient importantes, et bien d’autres choses. Maman m’a donné la culture, l’éducation, et tout ce que je suis devenue c’est grâce à elle, et à ce qu’elle a transmis de ce qu’elle même avait reçu dans son éducation. 🙂

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  4. Un texte très émouvant et sensible sur la condition des prématurés il y a bien longtemps et les séquelles qui se sont ensuivies. Merci de nous livrer cette tranche de (début) de vie avec ton talent, on ne voit pas les mots imposés (y étaient-ils au moins ? 😆 ) !!! Bon week-end et bisous Geneviève et merci pour cette jolie participation ! 😉

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    • Bonsoir Aspho,
      Pour une première participation chez toi, j’ai trouvé mon texte du bof de chez bof.
      Ce n’était pas facile à écrire pour le début, car sciemment je voulais rester dans le mystère. Il semble que j’aie réussi 🙂
      Quant à la conditions des prématurés à cette époque en 1950, si j’ai survécu comme avait dit le docteur :
      « Si elle boit ses 20gr de lait par jour pendant une semaine, elle sera sauvée » sinon il ne pouvait pas se prononcer.
      Je ne fais que te raconter ce que le toubib a dit par la transmission orale faite par ma mère. Ensuite elle me racontait en riant. Et tu buvais à ce biberon comme un métronome. Ce qui m’a fait répondre bien plus tard. Je suis née gourmande et volontaire et ces deux choses là sont bien restées 🙂
      La volonté en ce moment, elle laisse un peu à désirer. 🙂 Oui oui les mots imposés sont bien là, sauf un dont j’ai pas pris note. 🙂
      Merci pour ton retour. Jusqu’à présent les lectures sont vraiment chouettes et variées.
      Bisous et bonne semaine. 🙂

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  5. Très belle idée. J’ai lu des articles sur la prise en charge des nouveaux nés et sur le fait qu’une séparation dès la naissance, même de quelques heures, entrainait une réaction neurologique irrémédiable, les sensibilisant davantage à l’angoisse de l’abandon et à toutes formes d’addiction. Le cerveau du bébé est en quelques minutes en manque.
    Bises

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  6. Pingback: LES PLUMES 45 – LES TEXTES DU MANQUE ! | Les lectures d'Asphodèle, les humeurs et l'écriture

C'est gentil d'y avoir pensé, merci.

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