Les mots

Les mots

Nous nous sommes rencontrés sous la plume, au sein d’une page blanche.

Les liés et déliés de nos langues respectives nous avaient fait découvrir que nos cœurs étaient à l’unisson mais nullement libres.

Tu m’as conquise par ta magie, je t’ai conquise par mon érotisme. Les mots se sont couchés, se sont enchevêtrés, et le Merveilleux nous a enveloppés dans son grand manteau mystérieux d’un amour, d’une amitié, de désirs fougueux.

Les auteurs de ces mots nous ont fait vivre de merveilleux moments, d’une profonde intensité, d’envolées passionnées vers des sons d’une mélodie si douce à nos oreilles.

Je me suis couchée sur la pureté de ce lit, et les lettres je les ai tendues vers toi, comme une bouche sensuelle pour mieux te prendre du bout des lèvres, avec cette gourmandise que tu connais. J’ai avalé les mots, l’alphabet, comme différents nectars exquis, je me suis caressée avec toutes ces ondulations qu’ils formaient.

Il y a eu les lettres, puis les mots. Les phrases ont suivi et nous ont attirés dans une danse lascive irrésistiblement l’un vers l’autre.

Tu as attiré la lettre A, celle de l’amour, et puis la lettre D, de désir, vers tes doigts habiles.

Moi j’ai cueilli la lettre A, comme toi, puis la lettre C, comme cœur, la lettre F comme folie, la lettre P, comme passion.

Nous les avons mélangées toutes ces lettres, nous nous en sommes habillés, mais elles n’ont pas suffit pour nous réchauffer des rigueurs de l’hiver, et de la flamme qui dangereusement s’approchait de la feuille.

La bougie qui brûlait près de la page était là pour éclairer les auteurs, les lettres, les mots et les phrases.

Mais devant les écrivains, les lettres ont commencé à s’entremêler, prises par des désirs soudains et inassouvis. Deux lettres A se sont fait face, se sont caressées, et se sont écroulées sur cette page prises par un tel vertige, de sensualité, de désir, et d’érotisme. Enroulées l’une dans l’autre elles n’ont plus formé qu’une seule lettre A dans l’union totale et fusionnelle.

C’est à ce moment là qu’un grand coup de vent faillit faire tomber la bougie sur la page remplie de phrases.

Finalement la plume resta en suspens au-dessus du texte inachevé, et se dirigea vers le pot d’encre, s’y plongea, pour continuer un récit qui n’a pas de fin.

Aujourd’hui l’un des auteurs n’écrira plus, son encrier personnel est tombé.

Il ne reste plus que la plume que je tiens dans la main, suspendue dans l’air, à la recherche des mots qui nous ont si souvent, fait tant de fois rêver ensemble, au-dessus de toutes les contingences de l’âme, de l’esprit et rien qu’à l’écoute du cœur.

Mais les écrits, peuvent devenir cruels devant la réalité de l’existence, qui elle ne fait pas de cadeaux, même si les mots et les phrases restent vrais, authentiques.

Les larmes coulent sur le papier, à la recherche, d’une boucle, d’un délié, ressemblant à la courbe de ton corps tant de fois imaginé, enroulé autour du mien.

L’union des lettres était une chose, mais l’esprit s’est emparé des mots et des phrases, le cœur les a accompagnés, et le tout est retourné à l’état du rêve et du fantasme, ce qui était le début de la page.

Les mots Cœur, Amour, Folie, Désir, et aussi Amitié font actuellement une grande sarabande dans le mot Vie.

Elles nous prennent réellement chacune séparément, et nous emportent vers d’autres horizons.

Toutefois, les souvenirs sont tellement beaux, respectueux, merveilleux, que la plume ne peut que se poser sur la page pour continuer seule à chanter l’amour et l’érotisme et tracer en ton nom de nouvelles notes, qui viendront s’ajouter au chant mélodieux que nous avions commencé ensemble et où l’amour pour les auteurs continuera et portera le nom : Amitié.

Alors de ma plume j’écris Amitié tu es, au nom de l’amour que je te porte. (toujours d’actualité)

© Geneviève Oppenhuis (filamots – pétale 2006 autres pseudos sous lequel cet écrit a été publié.)

Source de l’image : http://antiblouz.blog.lemonde.fr/2006/06/
Ce blog ne semble plus exister.

Un champs de trèfle

trefle-4-feuilles-1

Un champs de trèfle.

Carine courait à perdre haleine dans le bois, essayant de retrouver son chemin. Ils étaient parti en groupe pour une course d’orientation. Carte IGN en mains, bottines et sac à dos, ils marchaient par groupe de deux. Ayant cru apercevoir la forme d’un sanglier dans le lointain, elle avait pris peur et s’était éloignée de son amie.

Hagarde, elle trébucha sur une branche et tomba dans la boue. Elle soupçonnait plus que n’entendait derrière elle le pas traînant d’un inconnu. Il lui semblait même le sentir se rapprocher.

Son horoscope du matin lui avait bien prédit qu’elle aurait une mauvaise journée. Même si elle ne croyait pas à toutes ses sornettes, elle se disait qu’elle n’était pas dans une situation très confortable. Il continuait à la suivre, elle le ressentait. Elle ramassa un bâton, au cas où elle devrait se défendre.
Lorsque soudain elle eut une idée lumineuse. Elle prit le petit miroir qui se trouvait dans une de ses poches et retourna les rayons du soleil vers la personne qui la suivait.

Elle vit alors l’homme se couvrir les yeux. A sa grande stupéfaction il se transforma en un immense trèfle de plus d’un mètre. D’autres se joignaient à lui par dizaine, plus petits, l’entouraient, l’escortaient dans ce fourmillement de nouvelles pousses. Elle fut bientôt entourée de tout un champs qui grandissait à ses pieds à perte de vue. Carine se demandait si elle ne rêvait pas.

– Carine ! Carine ! Où es-tu ? criait une voix familière.
– Je suis ici, répondit-elle en reconnaissant la voix de son amie Julia.
– Vient voir lui dit-elle, vient et regarde ! Julia arriva sur les lieux.
– Oh ! lui dit-elle, tu as trouvé le chemin du magicien ?
– Comment ? Quel magicien ? Cela n’existe pas voyons dit-elle en souriant à son amie.
– Regarde sur la carte répondit Julie en la dépliant. Elle pointa de son doigt un lieu où il était écrit : La folie du Magicien, comme lieu-dit.
– Je vais te faire une confidence lui dit son amie, une histoire que ma grand-mère m’a racontée.
Toute personne s’égarant ici risque de rencontrer le faiseur de trèfles. C’est un magicien qui grâce à ses pouvoirs t’indiquera que dans les mois qui viennent tu rencontreras l’amour, le vrai, le grand.

Carine éclata de rire en lui répondant qu’à tout cela elle n’y croyait pas. Mais au fond de son cœur, bien caché à l’abri des regards indiscrets, elle se dit : Et pourquoi pas, si c’était vrai ?

© G. Ecrits – freesia 27-04-2013

(texte repris depuis filamots dans « Ateliers d’écritures »).